INTRODUCTION
Au Burkina Faso, la mission de l’école est définie par la loi d’orientation de l’éducation. Il s’agit de garantir le droit à l’éducation de chacun afin de lui permettre de développer sa personnalité, d’élever son niveau de formation, d’exercer sa citoyenneté, de préparer son insertion dans la vie sociale. Ces nobles objectifs ne pourront être atteints sans le respect d’un certain nombre de principes qui sous tendent la réussite des activités scolaires .La neutralité est l’un des ces principes fondamentaux de l’école.
Le respect de celle-ci est-il une réalité dans notre pays ? Nous ferons une analyse critique des pratiques courantes dans notre système éducatif et dégagerons les exigences en la matière. Mais avant élucidons le concept de neutralité scolaire.
I. DEFINITION
La neutralité est le caractère, l’état d’une personne ou d’une entité qui s’abstient de prendre parti, de s’engager d’un côté ou de l’autre. Elle suppose l’impartialité et l’objectivité.
Fort de cette explication, la neutralité scolaire renverrait donc à une école laïque, apolitique, exempte de toutes discriminations basées sur le genre, l’appartenance sociale (caste, ethnies, riche, pauvre…) .De ce fait, elle implique que l’école soit l’école de tous, qu’elle reste respectueuse de chacun ; qu’elle considère l’appartenance religieuse ou idéologique comme une affaire de conscience strictement privée qui n’a pas à s’exprimer à son sein.
Tout compte fait, la neutralité scolaire voudrait que l’école soit protégée des influences du monde extérieur (influences politique, économique, religieuse…)
II. ANALYSE/ETAT CRITIQUE DES PRATIQUES
Comme pratiques, nous ébaucherons quelques attitudes ou comportements des divers acteurs de l’éducation : comportements qui sont surtout en décalage avec le respect de la neutralité scolaire.
II.1- Au niveau des enseignants
On peut noter chez les enseignants les pratiques ci-après :
- l’affichage par certains de leur appartenance politique ou religieuse par le port vestimentaire ou autres symboles (habit à l’effigie d’un parti, port ostentatoire du voile ou de la croix…) ;
- l’absence ou l’interruption de cours pour s’adonner à des pratiques religieuses ;
- plus d’égard envers des enfants issus de milieu favorisé (fils de chefs, fils de riches, disposition par caste dans la classe). Comme conséquences, certains élèves se sentent rejetés de même il règne une certaine tension entre les enfants ;
- les pratiques sexistes consistant à considérer les garçons plus que les filles dans les activités scolaires ;
- le manque d’impartialité dans les sanctions.
II.2- Au niveau des directeurs d’écoles
En sus des comportements ci-dessus évoqués, certains directeurs d’écoles ont des préférences pour certains adjoints sur la base de la parenté, de l’appartenance religieuse, politique ou du sexe. De ce fait, ils sombrent dans un laxisme préjudiciable au bon fonctionnement de l’institution. Ce laxisme engendre généralement des absences répétées du personnel, des préparations irrégulières et bâclées des leçons et une mésentente à l’école.
D’autres aussi prennent position en des groupes antagonistes. C’est le cas des écoles situées entre deux localités en conflit. L’implication sans discernement pour un parti peut exacerber le conflit, de même elle peut provoquer le rejet de l’école par une frange de la population.
II.3- Au niveau des encadreurs pédagogiques
A ce niveau, on peut relever les attitudes suivantes :
- mouvements du personnel enseignant et l’accord de faveurs sur la base d’accointances politiques, religieuses, ethniques, ou encore selon des intérêts économiques ;
- ouvertures d’écoles conditionnées par des pots de vin ;
- mobilisation des enseignants et des élèves pour des campagnes politiques ou pour accueillir des autorités politiques.
II.4- Au niveau des autorités éducatives, décideurs et partenaires sociaux
- L’implantation d’écoles comme récompenses électorales pour des localités au détriment de certaines localités inscrites aux plans d’action.
- Le laxisme des autorités quant au respect de la neutralité scolaire dans les établissements privés (non respect du programme en vigueur, non respect de la laïcité).
- La grande influence des Partenaires Techniques et Financiers (PTF) surtout métropolitains sur l’orientation du système éducatif.
- La non visibilité des actions du Conseil National de l’Education (CNE) qui devrait être le rempart et le garant des politiques éducatives.
III. DES EXIGENCES DU RESPECT DE LA NEUTRALITE SCOLAIRE
• L’enseignement public est neutre, la neutralité philosophique, politique et religieuse s’impose aux enseignants et aux élèves. Ceux-ci devrant se garder d’afficher leur appartenance idéologique dans le domaine scolaire.
• Tous les élèves doivent être considérés sur le même pied d’égalité pendant les activités scolaires. Ils ne doivent servir en aucun cas à une publicité.
• Pour la bonne marche des écoles, les encadreurs pédagogiques, les directeurs doivent être de bons leaders. Aussi, se doivent-ils d’être impartiaux, loyaux et objectifs ; ceux-ci devront également rester à l’écoute des enseignants et de la communauté en vue de les amener à adhérer aux politiques éducatives du pays et à les appliquer. Ils agiront en tenant toujours compte de l’intérêt général du service.
• Au niveau étatique, la neutralité scolaire doit être entendue comme le prolongement d’égalité de tous les citoyens. L’Etat doit veiller à ce que toute action de partenariat respecte les valeurs fondamentales du service public de l’éducation ; il doit s’assurer de l’intérêt pédagogique des apports et de leur conformité avec les orientations du système éducatif.
• Il est enfin indispensable que l’Etat insuffle un dynamisme nouveau au Conseil National de l’Education (CNE) afin de lui permettre de jouer son rôle de régulateur de toutes les formes d’éducation.
CONCLUSION
Pour conclure, disons que la neutralité scolaire demeure le premier et le plus épais rempart contre l’intrusion de toute idéologie (qu’elle soit politique, religieuse, économique) dans l’enseignement public.
Pour ce faire, elle constitue une valeur républicaine que l’on devrait observer en vue de garantir l’égalité d’accès et de formation pour tous. Cependant force est de constater dans la que dans pratique, il existe de nombre manquements aux règles élémentaires de ce principe. Il s’avère alors nécessaire d’informer et de former tous les acteurs et partenaires de l’éducation afin qu’ils les observent à l’école. De même, l’Etat doit jouer son rôle régalien.
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